4. Dame Rosalia (Alaïs, Guilhem, Kernt, Rostan)

Le mercredi, au coucher du soleil, vous est parvenu à tous quatre la missive suivante, rédigée avec une écriture élégante :

Citation :

Cher(e) ami(e)

Si vous voulez me rencontrer, rendez-vous devant l'Eglise Saint Sernin à une heure du matin.

R.

Froissant la missive avant de la ranger dans ma manche, je me fait une remarque à moi même :

-Ce n'est pas trop tôt...

Je serais à l'église avec de l'avance et accompagné de Renaissancia.

A la lecture de la missive, les yeux de Rostan se ferment un instant et un sourire se dessine sur son visage.

-"Enfin..." murmure-t-il.

Après s'être soigneusement préparé et rendu un minimum présentable, il part tôt dans la nuit pour arriver en avance et repérer les lieux.

A la réception du message, je ne fais aucune réflexion. Je me rends à l'heure dite devant l'Eglise, un peu dérangée par le choix du lieu.

Agréablement surpris par la lettre aux mots délicatement surpris, je réprime difficilement une grimace ironique en découvrant le lieu du rendez-vous.

- Saint-Sernin, encore une fois !

Vêtu d'une tenue sombre pour ne pas attirer l'attention, je quitte la demeure de Sapho sans hâte vers minuit et demie afin d'arriver à l'heure devant l'église.

Kernt et Rostan arrivent à peu près en même temps mais Rostan fait juste un signe de la main avant de fureter autour de l'église. Très vite cependant, il comprend, tous commes ses camarades un peu plus tard, qu'il vaut mieux ne pas trop en approcher car elle "picote" quelque peu : ce n'est pas seulement qu'elle vous met mal à l'aise, c'est comme s'approcher, physiquement, d'un lieu trop chaud...

Cela ne vous empêche pas d'admirer ce magnifique bâtiment construit à la gloire de Dieu, le Seigneur de tous, même des vampires dont il s'est détourné - ou bien sont-ce qui se sont détournés de lui ? Quelle que soit la réponse à la question, vous êtes exclu de cette communion et c'était comme si le lieu lui-même vous le faisait ressentir. En conséquence, la contemplation d'un des plus bâtiment de votre temps ne peut vous laisser indifférent et se teinte de rancune mal déguisée ou de regrets, selon les caractère des uns et des autres.



Alors qu'Alaïs et Guilhem arrivent très ponctuelleemnt, un volet d'une maison située sur la place de l'entrée de l'église s'ouvre, et une lumière apparait à la fenêtre, comme une invitation silencieuse. Mais peut-être n'est qu'un hasard ? Quoiqu'il en soit, vous êtes pour l'instant tous les quatre sur la place, seuls, et aucun bruit de pas ne se fait entendre.

Après avoir salué mes comparses d'une signe de tête à leur arrivée, je reporte mon attention sur la lumière qui vient d'apparaitre.


-Hum?

Curieux, je m'approche discrètement de la lumière essayant, autant que faire se peut, de ne pas être vu des personnes à l'intérieur. Si il ne s'agit que d'un humain souffrant d'insomnie, il risquerait d'être étonné de voir ma tronche apparaitre à sa fenêtre...

Tandis que Kernt se rapproche de la lumière, je me rapproche de Rostan et d'Alaïs et les saluent, tout en observant attentivement les alentours. Je constate avec un brin d'ironie dans la voix:

- Les grands esprits se rencontrent... Voilà bien du monde pour une heure si tardive.

Répondant d'un signe discret aux salutations de Kernt, je dis à Guilhem.

-Tardive, ce n'est qu'une question de point de vue. C'est un plaisir de vous revoir. Je suppose que nous sommes tous là pour la même raison. Entrons donc, Dame Rosalia doit déjà nous attendre.

Sur ces mots, j'avance, confiante, vers la fenêtre illuminée.

Rostan salue ses homologues, puis emboite prudemment le pas à Kernt et Alaïs .

La nervosité et l'impatience se lisent sur son visage.

Alors que Kernt se dirige vers la fenêtre de la maison, il se fait doubler par Alaïs et Rostan qui entrent sans autre forme de procès. La pièce et humble : une table, deux bancs, des murs blancs, une cheminée où rougeoient quelques braises, un lourd buffet, et cette chandelle qui brille à la fenêtre.

Près d'elle, dans la pénombre, vous distinguez une silhouette enveloppée dans une lourde cape, au visage cachée sous l'ombre d'une capuche.

- Bienvenue dans cette demeure, si vous venez en amis.

La voie est féminine, très douce, calme, comme une rivière descendant le long d'une plaine plane.

Je répond au nom de ceux présents, sans vraiment prendre la peine de leur demander leur avis.

- Il n'y a pas de raison pour nous montrer hostile. Vous semblez déjà savoir le pourquoi de notre présence, quelle raison de se méfier?

Effectivement. Qui prend la peine de se cacher sous une cape tout en prenant le soin d'attirer l'attention sur l'endroit où il est? Si ce n'est pas Dame Rosalia, c'est du moins quelqu'un qui sait pertinemment pourquoi nous sommes là.

Après avoir murmuré quelques mots à Renaissancia, Kernt tendit le bras afin que le corbeau prenne son envol. Une fois le volatile parti, il pénétra dans la pièce sans faire plus de manières mais resta silencieux une fois à l'intérieur.

J'étudie pendant quelques instants encore la place vide, tandis qu'Alaïs, Kernt et Rostan sont déjà entrés. Un piège semble un éventualité peu probable, mais après tout, ces derniers temps, certains nouveaux-nés n'ont-ils pas déjà été la proie d'attaques encore plus inattendues ? Je finis par suivre mes collègues, sans pour autant relâcher mon attention, et sans vraiment comprendre pourquoi notre entrevue est entourée de tant de mystères.

La silhouette porte la chandelle sur la table et ferme les volets. Puis elle s'adresse à Guilhem, le dernier entré.

- Voulez-vous bien fermer la porte, je vous prie ?

Une fois que la demande a été réalisée, elle se tourne vers Alaïs :

- Si vous croyez que j'aime le mystère, vous vous trompez. Ce n'est pas par loisir que je passe mes nuits cachée et que chacune de mes sorties sont faites dans le plus grand secret et la plus grande crainte.

Elle enlève alors sa cape, révélant un visage régulier et jeune, qu'une grosse ride au niveau du front terni à peine, et une croix en pendentif tombant sur une poitrine pudiquement couverte. D'elle se dégage une aura de douceur et de paix qui semble être une pâle copie de l'aura de l'Eglise Saint Sernin, mais sans cette sensation oppressante de rejet. Il vous vient naturellement à l'esprit que la personne qui est en face de vous mérite votre respect, et peut-être un peu mieux encore.



- Mais je sais que je peux vous faire confiance, que ce soit par votre ascendance, ou simplement parce qu'Adilva vous a choisi pour m'accompagner.

Elle vous fait signe de la main de vous asseoir sur les bancs, où elle-même s'asseoit avec grâce.

- J'imagine que vous avez beaucoup de questions à me poser. Mais je suis d'abord curieuse, je l'avoue, de savoir qui est qui... Adilva m'a parlé de vous, et je connais vos noms, mais je ne sais à quels visages les attribuer.

Je m'incline légèrement avant de répondre.


-Je suis Kernt pied léger. Infant d'Adalbert d'Avignon. Mais, je présume que nous deviez vous en douter.

Puis je prend place sur le banc sans rien ajouter.

Après avoir soigneusement refermé la porte derrière moi, je salue dame Rosalia en portant la main à mon coeur, et j'annonce d'une voix grave et respectueuse:

- Bonsoir ma dame. Guilhem Pons d'Artigat, infant de Sapho, et votre serviteur.

Puis je m'assieds sur un autre des bancs disposés autour de la pièce.

Rostan, d'abord fébrile, se réfrene soudain.

-"Pardonnez mon impudence, ma dame, mais dans le monde des caïnites l'usurpation d'identité aussi bien par l'apparence que par l'aura n'est pas inhabituelle même si elle requiert un certain niveau. Celà dit la ville de Tolosa accueille son lot de vampire puissant et même un mystérieux ancien qui semble inquiéter jusqu'au pouvoir en place... Aussi, même si cette question est d'une effronterie que, j'espère, vous aurez la bonté de pardonner, je me dois de la poser : Etes vous vraiment Dame Rosalia ? Qu'est ce qui nous prouve votre identité ?"

Elle t'observe attentivement et répond d'une voix douce :

- Pourrais-je savoir qui me pose cette question ? Il me sera peut-être plus facile de pouvoir satisfaire cette légitime question si je peux supposer ce que vous savez déjà de moi...

Rostan hoche la tête.

-"Mon nom est Rostan lo Sorber, tzimisce nouveau né, infant d'Igor de Caraman et envoyé dans la ville de Tolosa pour honorer en son nom la promesse de soutien qu'il a faite à une certaine dame Rosalia. Mon sire ne m'a donné que ce nom et le fait qu'elle se trouvait dans cette ville. Le manque d'information pour cette mission devant faire acte d'éducation et de punition pour ma conduite orgueilleuse..."

Elle hausse son fin sourcil et sourit.

- Il est vrai que votre Sire n'est pas reconnu pour sa douceur. De fait, je ne connais pas un Tzimisce qui le soit... Il m'est difficile, en conséquence, de prouver une idendité qui ne correspond à aucune attente que vous pourriez avoir à mon sujet. Peut-être que cela...

Elle se retourne et relève sa longue chevelure dorée, laissant apparaître sur la nuque un oeil tatoué.


- Peut-être que cela sera une preuve suffisante ? Votre Sire a le même dans le creu de son poignet droit, et ce n'est pas une coïncidence.

Elle écarquille les yeux et réfléchit quelques instants :

- Que vous voudriez voir ? Des informations qui nous concernent tous les deux, j'en ai quelques unes : je sais que vous vouliez me tuer, pour une raison que j'ignore, cette nuit-là dans le cimetière, et que je suis indirectement cause de votre transformation puisque c'est votre rencontre avec Hamed qui vous poussa aux portes de la mort. Si Votre Sire, et mon ami, n'était pas intervenu alors, je pense que vous ne seriez pas là pour me poser des questions. Mais il est difficile de vous faire "voir" cela ? Ou bien parlez-vous de la barrière que j'ai alors utilisée, et qui est le niveau 4 de la discipline Valeren, propre aux Salubriens de la branche guérisseur ? Je crains hélas que l'espace ne soit trop confiné ici car je ne peux décider du diamètre de cette barrière.

La réponse n'étant pas vraiment ce que j'attendais et bien que l'invocation d'une telle barrière eut été la preuve la plus sure de son identité; je hoche tout de même de la tête.


-Cela me semble suffire.

Je lance deux regards surpris à Kernt au fil de la réponse de Rosalia, le premier lorsque Rosalia mentionne son désir de la tuer, le second lorsque le nom d'Hamed est mentionné. Je tourne la tête vers Alaïs, attendant de savoir ce qu'elle va faire...