Ancillas - Tolosa, juillet 1000

Esclarmonde sourit aimablement.

- Bien, alors si vous n'avez pas d'autres inquiétudes, je vais pouvoir signaler à notre chambellan que la cérémonie peut commencer.

J’acquiesce doucement et me tourne vers Dame Rosamund pour lui montrer que je suis prêt à affronter cette assemblée et me montrer digne de son enseignement, un léger sourire se forme sur mon visage, volontaire et motivé.

Voyant qu'aucun des nouveaux-nés n'a d'autres questions, les deux Sires invitent leurs infants à les suivre jusqu'à Thomas et Seracena, où viennent se greffer, plus timidement, deux vagues princes de villes de campagnes et leurs progénitures.

Voyant cela, le chambellan fait taire les animations petit à petit, les attentions se portant alors sur la cérémonie que l'Italien annonce de son accent roucoulant :

- Mesdames et Messieurs, voici enfin venu le moment où cinq de nos infants vont connaître le moment d'être des vampires à part entière.

Le premier nobliau s'avance avec son infant en lui tenant la main jusque devant le trône, un peu décalé sur la droite. Son Infant pose les genoux à terre et son mentor se tient debout derrière lui, et le présente. Ainsi fait aussi le second nobliau, dans l'indifférence et un brouhaha si généraux qu'on n'entend guère ce qui est dit, même si le Prince semble leur porter une attention soutenue, comme il se doit.

Puis c'est le tour de Thomas et de Saracena. Les conversations, naturellement, s'estompent, n'étant plus qu'un très vague flux au fond de la salle.

- Je présente Saracena, mon Infant, pour qu'elle soit libérée de ma responsabilité. Je considère qu'elle a fait ses preuves en servant vous-même, mon Prince, de façon fort efficace.

Puis s'avancent Rosamund et Melkan. Melkan dépasse d'une bonne tête Rosamund, mais la démarche féline de la rousse vampire la fait percevoir plus dangereuse encore. Bien que de deux styles complétement différents, ils dégagent une classe sauvage qui ne manque pas de panache. Melkan se met à genoux lui aussi, et Rosamund se place derrière lui.

- Je présente Melkan, infant de Nicolas, dont j'ai pris la responsabilité de l'éducation, et qui n'a plus guère besoin de mentor. Vu qu'il vous permet de circuler en forêt, et qu'il s'est fait sa place lui-même auprès des lupins, je pense qu'on peut dire qu'il a fait ses preuves... de façon fort efficace.

Thomas lui lance un regard qu'on aurait attendu tueur, mais qui n'est que rieur.

S'avance enfin dame Esclarmonde et sa pupille Alice. Là, le silence complet se fait, on entendrait un cœur battre s'il y avait eu un cœur vivant dans l'Eliysium. Les deux dames, brune et blonde, de vert et de bleu, s'avancent avec une grâce infinie. On dirait deux fées marchant sur l'eau. Si Alice éblouit par sa beauté juvénile et claire, Esclarmonde impose par son charme noble.

Alice s'agenouille elle-aussi, finissant la ligne des nouveaux-nés et de leurs mentors. Esclarmonde prend sa place, et élève sa voix chaude :

- Je vous présente Alice, Infant du comte fleuri, que j'ai élevé comme ma propre fille dès qu'elle fut sous ma responsabilité. Parce qu'elle a vécu des épreuves tragiques, choisie par l'Ancien pour être témoin de meurtres horribles, et qu'elle n'a pas hésiter à s'opposer à elle pour essayer de sauver son Sire, parce qu'elle a su se faire et conserver des amitiés parmi les plus respectés d'entre nous, parce qu'elle a su trouver en elle l'Harmonie qui fait vibrer toute âme de ceux de notre clan, parce qu'elle m'a accompagnée moult fois dans mes voyages diplomatiques dans les autres cités, je pense qu'Alice pourra aujourd'hui avancer seule, fidèle à elle-même, fidèle à son clan, fidèle à son Prince.

Le silence se fait un peu plu religieux. Comme toujours, les mots d'Esclarmonde frappent avec douceur. Sa manière de poser les choses, toujours avec élégance et force, rappellent aux vampires qui ils sont, et quelles devraient être leur place. Jehan applaudit légèrement le discours de sa sœur de clan, puis le silence revient.

Lugan se lève, va au premier infant, écoute son serment murmuré du bout des lèvres, les mains entourant celles du nouveau-né. Puis Lugan le fait se redresser, l'embrasse légèrement sur la bouche, et passe au suivant, qui lui non plus n'ose guère parler. Puis c'est le tour de Saracena qui, elle, articule ses mots d'une voix forte.

:saracena: - Prince ! Je suis Saracena, Infant du primogène Thomas, qui vous sert. Je servirai mon Prince et ma ville en servant mon clan, en étant les oreilles et les yeux, l'ombre tapie et discrète au bras fort. Je protègerai votre cité contre vos ennemis, qu'ils soient guerriers venus d'ailleurs, ou traitre dans vos murs. Je suis, et je resterai, si vous le permettez, Nosferatu au service de Tolosa.

Le Prince sourit enfin, plonge sans horreur les yeux dans ceux de la Nosferatu.

- J'accepte ton serment. Tu es délivrée de la responsabilité de ton Sire.

Il la fait se lever, pose ses lèvres sur les siennes sans qu'un frisson ne marque son dégoût sur son visage presque chaleureux face à la petite nosfé, que plusieurs déjà ont vue se promener dans les rues avec une hache sur l'épaule en guise d'arme.

- Que le chemin que tu arpenteras dans la nuit soit long et t'amène à la gloire.

Puis il s'avance vers Melkan, il prend ses mains jointes dans les siennes...

Respectueusement, je lève doucement mes yeux vers le Prince, mon Prince et d'une voix forte et déterminée que rien ne fait trembler ou hésiter, je prononce mon sermon :

"Moi Melkan Bortrax, fils de Nicolas et de Rosamund demande le serment auprès de Lugan Prince de Tolosa et lui jure fidélité. Je mets mon épée, et mon être au service de mon Prince. Je continuerai d'être un relais entre Lupins et Vampire sans jamais trahir les miens, sans jamais faillir ou faiblir."

Même si rien n'en parait, j’attends de voir si le Prince va se contenter du baiser rituel ou aura un petit sourire face à la touche "Gangrel" du sermon.

J'écoute avec attention les serments des autres nouveaux-nés, maintenant ancilla, de façon à corriger s'il le faut ma prestation. Je souris doucement quand Melkan prends la parole et acquiesce machinalement de la tête à ses dires.

- J'accepte ton serment. Tu es délivré de la responsabilité de ta Sire.

Le prince fait lever Melkan, qui le dépasse d'une très bonne tête, et le gangrel soit se baisser pour le baiser rituel.

- Dont je ne doute pas que tu seras le digne héritier.

Puis son visage se tourne vers celui d'Alice, s'illumine malgré son air toujours aussi sérieux. Il s'avance vers elle, prend ses mains jointes dans les siennes. Son regard est de flamme. Délicatement, les ombres semblent quitter le couple ainsi formé, le laissant dans une lumière trop pure pour être naturelle, formant un écrin de clarté pour l'éclat de leur tendresse et de leurs regards.

J'adresse au prince un sourire doux alors qu'il s'approche de moi, et la hantise de m'exprimer en public qui jusque là me tiraillait disparaît au contact de ses mains. Je prends une petite seconde pour me ressourcer à son regard avant de déclamer mon texte, car mon serment c'est à tous que je l'adresse. Mon dos est bien droit le fait d'être agenouillée n'enlève rien à ma grace, je commence donc à parler avec aisance sur un ton assuré avec un certain enjouement aux sonorités variées excluant toute monotonie. Afin d'intéresser plus le public je joue de regards vers lui lors des salutations.

- Mon prince, gentes dames, messires, je commencerais avant tout par vous souhaiter la bonne nuitée. Bonne en effet car elle symbolise pour moi le premier pas vers l'accomplissement en tant que caïnite, cependant, je dois tout de même avouer quitter avec regret Dame Esclarmonde qui a su me diriger, me conseiller et nourrir mes connaissances avec une maîtrise que j'espère un jour pouvoir égaler. Devenir ancilla implique de nouvelles responsabilités, dont celle de prêter allégeance à son souverain, j'ai su apprécier chacune de ses décisions en tant seigneur de la ville et de ses pairs depuis mon arrivée à l'élysium, c'est donc avec une joie certaine que je prête ce soir même, devant témoins, allégeance au prince Lugan de Tolosa. Je mets à disposition de la ville et son dirigeant tous les talents que je possède qui puissent conduire à sa prospérité et à maintenir la paix qui y règne, bien que le domaine de la guerre me soit très peu connu grâce à mon mentor je tâcherais de me rendre le plus utile possible dans tout ce qui touche la diplomatie.
Et par des temps plus cléments où ni les armes ni la diplomatie ne seront nécessaires, lorsque mon apprentissage le permettra je tâcherais d'égayer vos soirées en tant que barde. En attendant cela je vous remercie déjà pour toute l'attention dont vous m'avez gratifié ce soir.

Je garde le sourire à la fin plongeant mon regard dans celui du prince un peu plus intensément.

La ferveur avec laquelle Alice prononce ses serments est touchante. Elle vous rappelle le temps où le soleil pouvait caresser votre peau, où vous pouviez sentir le jus des cerises envahir votre palais, où vous pouviez courir dans les champs, où votre cœur battait encore. Il y a une telle pureté dans ses propos, un tel don d'elle-même que c'est à votre enfance que vous pensez, du temps où tout était simple... Aussi est-il difficile de ne pas être insensible à la façon d'être de la belle toréador, qui semble incarner l'antithèse du monde vampirique.

C'est ce que semble penser Lugan, qui la fait se relever, ce qu'elle fait avec grâce, telle une fleur se redressant pour accueillir le soleil.

Tout le monde aurait retenu son souffle s'il y en avait eu un possible.

Ce ne sont pas seulement les ombres chassées par Lugan qui vous paralyse ainsi, mais l'intensité de la scène. Tout se passe à la fois très lentement et très vite. Lugan saisit délicatement la taille d'Alice, glisse une main sur sa nuque, annonce :

- J'accepte ton serment. Tu es délivrée de la responsabilité de ta Sire.

Au moment où il avance ses lèvres pâles de celles, naturellement purpurines, de la nouvelle Ancilla, vous savez déjà que ce ne sera pas un baiser ordinaire. Leurs lèvres se mêlent, et autre chose sans doute, avec une douceur maitrisée, puis oubliée. C'est comme si soudain les deux êtres avaient effacé de leur mémoire qui et où ils étaient, qu'ils vous laissaient dans un monde terne où vous ne pouvez voir que de loin une lumière salvatrice.

Puis ce moment magique prend fin - et vous en êtes à la fois tristes et soulagés. Dans la cour de Lugan, il se passe alors une chose étrange. Tout le monde semble pressés que finisse la cérémonie pour être libre de bouger, les caïnites ressemblant aux insectes quand menace l'orage.

Lugan lance sa dernière phrase, en s'écartant un peu de celle dont il vient de faire sa favorite officielle :

- Que tes pas t'amènent toujours à la lumière.

Aussitôt Eleanore s'avance, grande dame, et salue Alice avec une révérence impeccable.

- Gente dame, permettez-moi d'être la première à vous rendre hommage.

Son regard dit toute sa haine... Avant qu'elle ne se relève et laisse la place à d'autres... C'est un vrai défilé devant la belle Alice. De fait, qui oserait manquer à la favorite du Prince ? Certains n'oublient pas d'aller féliciter les autres Ancillas, mais la queue qui se forme littéralement devant la Toréador laisse présager un long moment de solitude pour Alice...

Si Saracena n'est pas trop occupée, je m'avance vers elle pour la féliciter et la saluer à nouveau. Je garde un oeil sur Alice mais je me doute que le défilé-procession va durer longtemps, elle a désormais un rôle à tenir et je ne voudrai pas l'embêter par ma présence. Je la verrai plus tard. De toute façon, elle sait déjà qu'elle a plus que mon soutien.

Si certains s'approchent pour me féliciter, je leur fais un léger sourire ou hochement de tête, je ne suis pas dupe de ses jérémiades de la cour. Que mes bois me manquent...

Je sourie à Saracena, si j'arrive à capter son regard et m'approche.

Le bonheur qui me submerge est si intense que j'ai du mal à retrouver toute mon attention, je regarde avec regret le prince s'éloigner de moi et prononcer la phrase mettant fin à la cérémonie. Un léger sursaut me saisit lorsque devant le mouvement engendré dans la salle je comprends ce qu'il vient d'arriver, un sourire rêveur indétrônable sur le visage j'accueille la première caïnite se dressant devant moi.
Je sens sa haine mais cela n'altère en rien la félicité qui m'anime, j'ai un léger rire intérieur à ses dires me rappelant de mon échange avec Saracena un peu plus tôt, mes espoirs ont pris formes et je ne compte pas les laisser dépérir.
Je soigne mon port et accueille chacun qui souhaite me présenter ses félicitation avec le même sourire angélique teintée d'une once de soulagement en voyant s'éloigner la primogène Lassombra.

Faisant la queue comme tout les autres, je ne manque pas de féliciter les nouveaux Ancillas. Il faut dire que, loin de la tradition, ils étaient les personnes que je connaissais le mieux dans cette ville à cause des nombreuses affaires qui m'en avait éloigné pendant quelques temps. C'est presque avec une certaine camaraderie que je viens serrer la mains de Melkan un air enjoué avant de le rapprocher et de lui dire ces quelques mots :

"Si vous le permettez, je ne vous appelerais pas "grand frère" malgré votre rang, mais cela n'empêche, félicitation cher ami"

La fin de cette phrase se terminant sur une tape dans le dos laissant le Gangrel se faire féliciter par les autres invités. Quant à Alice, je fis une révérence digne d'une princesse (ce qu'elle n'est pas loin de devenir par alliance) avec de sourire amicalement et volontairement outrageusement protocolaire

"Madame, votre discours était époustouflant, et vous qui stressiez... avouez vous vouliez juste ménager le suspens, n'est ce pas ?"

Je lui fais le baise main, avant de me rapprocher de son oreille pour ne pas qu'on ne nous entende trop avant d'ajouter

"Mais j'ai été légèrement déçu par le final tellement banal (pouffe légèrement le rire devant son décalage avant de conclure) quoiqu'il en soit, félicitation"

"Merci cher Astier, votre marque d'affection me touche beaucoup."

Je lui rends alors la tape amicale dans le dos, façon Melkan.

Je souris plus sincèrement quand je vois le sire Astier se présenter à moi, j'écoute avec amusement ses dires et avant que celui-ci ne quitte l'intimité qu'il a créé en s'approchant de mon oreille lui réponds.

- La banalité n'était là que pour épargner les sens de certains, nombre de personnes présentes n'auraient su rester éveillées devant un discours trop sophistiqué. Si ça ne tenait qu'à moi j'aurais pu discourir des heures.

Je dis cela sur le ton de la plaisanterie qui est accentué par mon visage rayonnant de gaieté. Lentement je reprends ma posture droite instaurant à nouveau une distance protocolaire entre nous deux.

- Merci sire Astier, vos félicitations me touche sincèrement.